Enfant, j’étais ce qu’on appelait une enfant « bien potelée ». Puis, vers les 11/12 ans, entre l’arrêt de l’activité physique extrascolaire (depuis plusieurs années, j’étais majorette) et la survenue de troubles du comportement alimentaire, ma courbe de poids n’a plus jamais cessé de grimper.

J’ai toujours subi diverses moqueries sur mon physique : « trop grande », « trop grosse », etc …. Mais même si enfant, je ne comprenais pas les moqueries, adolescente et adulte, je les redoutais. Je les voyais bien, au quotidien, les différences physiques entre les autres et moi : trouver des vêtements à ma taille et des chaussures taille 42 en extra large difficilement accessible en magasins de proximité ; les chaises de bistrot bien trop étroites pour mes bourrelets… Mais pour autant, je ne me rendais pas compte de l’ampleur des dégâts, d’autant que jamais mes kilos ne m’ont gêné pour bouger et travailler comme tout à chacun.

N’ayant jamais eu de balance à la maison, je ne me pesais pas. Ce n’est que lorsque j’ai été prise en charge pour lutter contre un cancer que j’ai été pesée à l’hôpital où j’étais suivie. C’était en 2012. J’avais 35 ans. Et je pesais 150 kg ! Je crois que l’annonce de mon poids a été plus choquante que l’annonce de mon cancer ! Mais c’est à partir de ce moment, qu’on a commencé à me parler de chirurgie bariatrique. J’avoue qu’à l’époque, je ne connaissais rien de ces techniques médicales. Je n’étais donc ni pour, ni contre. Mais j’avais autre chose en tête que mon poids…

Après cette période, alors que je me remettais de mes soins passés, ma mère est tombée malade. Ma sœur et moi avons dû la transporter jusqu’aux urgences les plus proches. Après sa prise en charge, une aide-soignante qui revenait vers nous afin d’obtenir plus de renseignements, nous a appris que l’état de santé de ma mère était très préoccupant. Et que « son état d’obésité n’aidait pas ». Il faut savoir qu’à l’époque, je ressemblais beaucoup physiquement à ma maman. Et le fait de savoir que j’avais encore plus de poids qu’elle m’a fait prendre conscience de la dangerosité du mien pour ma santé. Je pense sincèrement que c’est la situation de ma mère, et les mots de l’aide-soignante qui m’ont décidé : la chirurgie bariatrique dont on m’avait souvent parlé était peut-être une bonne solution pour moi…

 C’est ainsi que je me suis retrouvée devant mon médecin traitant à lui parler de ma décision d’aller rencontrer un chirurgien spécialiste. Mais de rajouter que « avant de guérir mon corps, il faudrait guérir ma tête » : c’est à cette époque que mes troubles du comportement alimentaire, et mon poids, avaient atteint leur apogée. C’est ainsi que j’ai débuté un suivi psy afin d’apprendre à gérer mes TCA. Et peu de temps après, j’ai pu rencontrer une chirurgienne spécialisée dans les opérations de chirurgie bariatrique.

Lors de ce premier rendez-vous, beaucoup de questions sur mon parcours m’ont été posées. J’ai été mesurée. Et de nouveau pesée. Un deuxième choc : je savais que j’avais repris du poids puisque mes TCA faisaient que je mangeais toute la journée. Mais je ne m’étais pas imaginée avoir repris autant de poids car c’est pas moins de 177kg qu’affichait la balance. Je comprenais mieux pourquoi parfois mes chevilles me faisaient si mal que je ne pouvais pas marcher jusqu’à ma boite aux lettres….

La chirurgienne m’a expliqué en quoi consistait la chirurgie bariatrique, ainsi que les différentes techniques utilisées en fonction des patients et des résultats, des différents examens obligatoires à effectuer dans les semaines à venir… Je me souviens d’avoir rencontré différents corps médicaux : cardiologue, pneumologue, psychiatre et psychologue. Quand j’ai rencontré le psychiatre pour la première fois, j’étais en larmes devant lui, et sa réponse fut sans surprise : « non, je ne suis pas d’accord pour l’instant pour que vous subissiez une intervention de ce type ». Et je l’ai revu une deuxième fois, après plusieurs mois de suivi psychologique, cette fois-ci, j’étais souriante, et il m’a donné son accord pour l’opération.

Grâce à tous les différents examens, j’ai pu apprendre, entre autre, que je n’avais ni diabète, ni hypertension artérielle. Aucun problème de cœur ou de souffle. Par contre, j’avais un « foie gras » et une apnée du sommeil, m’obligeant à être appareillée la nuit, mais qui devrait s’améliorer avec une perte de poids. La gastroscopie (qui ne fût pas l’examen le plus douloureux, mais pas non plus le meilleur souvenir de ma vie…) avait permis de détecter la fameuse bactérie Helicobacter Pilori, et d’être traitée pour l’éradiquer.

Durant ce parcours, j’avais également pu rencontrer régulièrement une diététicienne. J’ai appris que je n’étais pas ce qu’on peut appeler « une grosse mangeuse » vu la quantité d’aliments ingérée lors des repas. Mais même si j’avais des assiettes peu remplies, elles étaient surtout trop grasses, et peu équilibrées. J’ai pu apprendre à modifier ma façon de manger et surtout à équilibrer mes repas au quotidien. Grâce à cela, et à une meilleure gestion de mes TCA, j’ai perdu 17 kg sans rien changer d’autres à mon quotidien.

Tous les examens ayant été fait, je suis passée en RCP (Réunion de Concertation Pluridisciplinaire) qui décide si oui ou non, on est prêt à bénéficier d’une chirurgie bariatrique. Et si oui, quelle chirurgie serait préconisée au vue des différents résultats d’examens passés. Pour mon cas, il a été décidé qu’un bypass serait le plus adapté étant donné ma tendance aux grignotages et mes reflux. J’ai donc été opérée en juin 2016, soit pratiquement 3 ans après avoir pris ma décision.

L’opération s’est très bien déroulée. Le post-opératoire également : aucunes douleurs, une pêche d’enfer, et une perte de 18kg le premier mois… Je revivais : marcher ne me faisait plus mal aux chevilles. Les deux premières années, j’ai vu mon poids descendre régulièrement. J’ai toutefois vécu deux « longs » paliers : un de 3 mois et un de 6 mois. La troisième année post-op, mon poids était stable. Mais avec un poids de 120 kg (j’avais investi dans une balance J), et donc une perte de plus 40 kg (près de 4,5 packs d’eau !), je le vivais plutôt bien, et j’étais très satisfaite de ma nouvelle vie. Je me disais que chaque nouveau kilo perdu, ne serait que du « bonus ».

Malgré tout, mes collègues et mon entourage me disaient régulièrement que j’avais encore perdu. Sauf que, comme je leur répondais : « ma balance me donne toujours le même poids ». Aussi, un jour j’ai eu l’idée de prendre mes mensurations. Grand bien m’en a pris car si les chiffres sur la balance ne bougeaient pas, les centimètres eux, s’envolaient pour mon plus grand plaisir. Puis, les chiffres sur la balance se sont mis à redescendre durant quelques temps… Jusqu’à passer sous la barre des 100 : 99,8kg exactement. Sauf que… à cette époque, lorsque je voyais mon reflet, je pleurais : je me trouvais « maigre ». Je n’arrivais pas à me reconnaître. Et puis Mme Covid est arrivée dans nos vies.

Entre les soucis liés à mon physique, le manque d’exercices et le stress lié au confinement, mes troubles du comportement alimentaire sont réapparus. Mais pratiquement un an s’était écoulé avant que je ne réagisse. Et c’est près de 20kg qui étaient revenus lorsque j’ai repris contact d’une part avec l’hôpital qui me suivait, et d’autre part, avec une psychologue pour reprendre une thérapie.

Aujourd’hui, je n’ai toujours pas perdu les derniers kilos repris. Je pèse donc encore 120 kg, et suis toujours en situation d’obésité « sévère ». Mais je suis passée de « la petite grosse effacée » qui disait oui à tout, à une personne qui ose s’affirmer. Sans pour autant avoir totalement changée : je suis toujours prête à aider mon prochain. Mais jamais plus au détriment de ma santé physique ou morale. Je me sens bien dans mon corps, bien mieux dans ma peau qu’avant l’opération. Et j’arrive même à me reconnaître sans pleurer, lorsque je me vois dans un miroir.

Laëtitia

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